Kinshasa (Agence Fides) – « 6 travailleurs humanitaires ont été tués et 11 kidnappés entre janvier et juin de cette année, avec plus de 200 incidents visant directement les travailleurs humanitaires sur le terrain » affirme Bruno Lemarquis, Représentant spécial adjoint de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et Coordonnateur résident humanitaire des Nations Unies en RDC, évoquant la situation au Nord-Kivu, à l'est du pays. A l'occasion de la Journée mondiale de l'aide humanitaire, célébrée aujourd'hui 19 août, Lemarquis a rappelé combien la tragédie vécue par cette région de la RDC, soumise à des massacres, des déplacements forcés de millions de personnes, des tueries de personnels humanitaires, a fait que la communauté internationale ne s'en soucie pas ou peu.
« Malgré la gravité des massacres et les souffrances endurées par les populations locales, le monde n'est pas suffisamment indigné par cette situation catastrophique », a-t-il déclaré. « L’absence d’indignation collective, cette tolérance, remet profondément en question notre humanité et notre capacité à prévenir et à agir contre la violence systématique qui décime des vies innocentes. C’est pourquoi je considère cette crise non seulement comme l’une des plus négligées au monde, mais aussi comme l’une des plus tolérées. »
Une crise qui continue de provoquer l’exode de centaines de milliers de personnes. « Au premier semestre 2024, environ 7,3 millions de personnes ont été déplacées en RDC. Ce qui correspond à plus de 400 000 nouveaux déplacés à partir de décembre 2023 », précise le coordinateur humanitaire de l'ONU.
Selon Lemarquis, les victimes les plus touchées sont les femmes, les filles et même les enfants soumis à la torture et aux violences sexuelles, dans le cadre d'une véritable stratégie de guerre criminelle visant à forcer les populations locales à fuir leurs villages (voir Fides 29/10/2007). Dans ce contexte, les maladies infectieuses telles que le choléra, la rougeole et la variole du singe se propagent facilement et rapidement. Enfin, selon Lemarquis, une seule donnée résume l'indifférence de la communauté internationale face au drame des Congolais de l'Est : « le plan de réponse humanitaire pour 2024 n'est financé qu'à 35 %, ce qui signifie que des centaines de milliers de personnes les personnes vulnérables sont laissées pour compte. »
Au Nord-Kivu, le principal conflit oppose l'armée congolaise, appuyée par certaines milices d'"autodéfense", et le mouvement M23, lui-même soutenu par le Rwanda voisin. Mais dans cette province ainsi que dans celles voisines du Sud-Kivu et de l’Ituri, plusieurs centaines de formations armées, dont une djihadiste, les Forces démocratiques alliées (ADF, voir Fides 24/06/2023) opèrent. Au-delà des conflits ethniques et tribaux, des raisons politiques et économiques alimentent l’instabilité de l’est de la RDC. A commencer par l’exploitation des immenses richesses naturelles de la zone, du bois au coltan, de l’or à l’étain, par toutes les factions belligérantes (voir Fides 26/1/2023 et Fides 1/2/2023). (LM) (Agence Fides 19/8/2024)