OraProSiria
par Gianni Valente
Quaryatayn (Agence Fides) - En août 2015, alors que les drapeaux noirs du califat flottaient sur une grande partie de la Syrie, les miliciens de l'autoproclamé État islamique avaient semé la ruine et la dévastation dans l'ancien monastère syrien de Mar Elian. Les djihadistes de Daesh avaient brutalement profané la tombe même du saint, comme pour effacer ce qu'ils avaient eux aussi reconnu comme le cœur battant du complexe monastique.
Aujourd'hui, sept ans plus tard, la vie, les attentes et la gratitude des chrétiens de la région se pressent à nouveau autour des reliques de Mar Elian. Un miracle peut être entrevu qui permettra à un lieu de prière et de paix de fleurir à nouveau autour des reliques du saint pour les chrétiens syriens, mais aussi pour leurs compatriotes musulmans.
Pour raconter cette histoire chrétienne de renaissance, un récit court et intense a été rédigé par le père Jacques Mourad, un moine syrien de Deir Mar Musa, la communauté monastique fondée en Syrie par le père Paolo Dall'Oglio, le jésuite romain disparu le 29 juillet 2013 alors qu'il se trouvait à Raqqa, la capitale syrienne de Daesh à l'époque. Précisément à Mar Elian, le père Jacques avait été enlevé le 21 mai 2015 par un commando de djihadistes. Le moine avait enduré de longs mois de captivité, d'abord en isolement, puis avec plus de 150 chrétiens de Quaryatayn, également pris en otage dans les territoires alors conquis par Daesh.
Aujourd'hui, alors que la communauté de Deir Mar Musa a repris en main le complexe monastique dévasté par les djihadistes, le père Jacques raconte l'intense travail accompli ces derniers mois dans l'espoir de voir Mar Elian s'épanouir à nouveau. Un travail réalisé au milieu des difficultés "liées à la situation économique de notre pays en raison des sanctions imposées".
Les travaux de restauration du monastère, raconte le père Jacques, ont commencé en mars par la construction d'un mur autour de la zone archéologique qui, avant la guerre, comprenait également l'ancienne crypte et la tombe du saint. Les travaux se sont poursuivis par la recherche et la collecte de pierres anciennes parmi les ruines encore éparpillées autour du monastère, qui pourraient être utilisées dans la reconstruction. Puis vint la reconstruction de la crypte, et la restauration de la tombe avec la récupération des anciens fragments trouvés.
Le désir, confie le père Mourad, était de célébrer la fête de Mar Elian au monastère, et de ramener les reliques du saint", qui avaient été trouvées et recueillies par le père Jacques lui-même près de la tombe profanée et avaient été mises en sécurité à Homs. Des reliques", note le moine de Dei Mar Musa, "qui ont une grande valeur pour tous les habitants de Quaryatayn : ceux qui résident à Quaryatein, ceux qui habitent dans les camps des réfugiés et ceux qui ont quitté le pays dans l'objectif de trouver un meilleur avenir pour leurs enfants". En août dernier, l'église, qui avait été incendiée par les djihadistes, a également été réparée et dotée d'un nouvel autel : une restauration qui a été effectuée sans éliminer complètement le noir de carbone des murs, afin que même dans ce lieu de culte et de prière, des traces visibles de cette étape de l'histoire récente demeurent. De jeunes amis musulmans ont également fait de leur mieux pour mener ensemble les derniers préparatifs. Enfin, le 9 septembre, jour de la fête de Mar Elian, plus de 350 personnes sont arrivées en bus de Damas, Nabek, Homs, Sadad et Maskané, ainsi que de nombreux prêtres syriens catholiques de toute la Syrie. La cérémonie d'inauguration, présidée par Youhanna Jihad Battah, archevêque syrien catholique de Damas, a également vu la participation, en tant qu'invité spécial, de Mor Timotheos Matta al Khoury, archevêque syrien orthodoxe de Homs. Les deux évêques, raconte le père Jacques, ont oint d'huile sainte la crypte reconstruite et l'église restaurée. Ainsi, la cérémonie de consécration est devenue "une formidable occasion de vivre la communion entre les deux Églises sœurs", qui avaient connu par le passé des périodes de conflit autour de la propriété du couvent qui avaient duré 200 ans. Une affaire qui avait divisé les deux communautés, malgré le fait que les membres des deux paroisses appartenaient parfois aux mêmes familles. "Le moment le plus émouvant, prévient le père Jacques, c'est lorsque les reliques de Mar Elian sont arrivées aux portes du monastère, et de là, un chrétien et un musulman les ont apportées et placées devant l'autel. "Tout le monde jubilait de joie devant la présence du saint". Dans la crypte, les évêques ont oint d'huile la tombe restaurée de Mar Elian. De nombreux amis musulmans du monastère étaient également présents à la liturgie eucharistique, en signe de proximité fraternelle. Après le long chemin de croix vécu par le peuple syrien", remarque le moine de Deir Mar Musa, "il n'était pas facile d'imaginer pouvoir vivre la joie d'une telle rencontre. Il existe certainement une force qui dépasse nos limites humaines". Après la messe, un professeur de philosophie, représentant la communauté islamique de Quaryatayn, a également prononcé un discours, récitant des versets de la Bible et du Coran, alors qu'il appelait les chrétiens du village à retourner dans leurs maisons et leurs champs, désormais desséchés. Dans son discours, le Père Jacques a tenté de suggérer "comment le Seigneur, par l'intercession de Mar Elian, nous a accompagnés à travers tous les événements vécus après la conquête de Quaryatayn par Daesh, jusqu'à aujourd'hui. Un voyage plein de douleur mais aussi de miracles, comme celui d'une unité plus puissante vécue entre chrétiens et d'une fraternité retrouvée également vécue avec les autres musulmans. Un parcours que le père Mourad a retracé sans colère ni orgueil, avec des mots pleins de gratitude : "A la fin de la cérémonie, se souvient le moine syrien, le père Michel Nouman, représentant de notre diocèse, a versé de l'huile d'olive sur les reliques de Mar Elian. Puis quatre personnes, dont un musulman, ont porté ensemblele reliquaire de Mar Elian, et l'ont mis dans le sarcophage " et nous avons clos en chantant en arabe et en syrien un bel hymne de Saint Ephrem le Syrien : " Heureux le bon serviteur : quand le Seigneur reviendra, il le trouvera éveillé, travaillant aux champs, du matin au soir... " ". Le même jour, le père Mourad, les évêques et les autres participants à la fête de Mar Elian ont également visité les autres églises de Quaryatayn, qui portent encore les traces de la guerre : "Nous avons aussi prié, se souvient le père Jacques, pour tous les chrétiens qui, auparavant, ont rempli ces églises de leurs prières et de leurs chants, glorifiant Dieu. Nous avons imploré le Seigneur, afin que ces églises redeviennent vivantes, remplies de nouveau par les prières des chrétiens qui aiment Dieu.". (Agence Fides 4/10/2022)