AMÉRIQUE/ÉTATS-UNIS - Les caractéristiques religieuses de la « Gaza Humanitarian Foundation »

lundi, 7 juillet 2025 evangéliques   mercenaires  

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Rome (Agence Fides) – La Gaza Humanitarian Foundation (GHF), l'organisme chargé de distribuer de la nourriture à la population de Gaza, est dirigée depuis le 3 juin par le prédicateur évangélique Johnnie Moore Jr., défini par le magazine Newsmax Magazine comme « l'un des 25 leaders évangéliques les plus influents d'Amérique ».
Moore remplace Jake Wood, un ancien marine qui a démissionné de son poste de directeur exécutif de GHF parce qu'il ne pouvait pas, selon lui, « mettre en œuvre le projet d'aide dans le strict respect des principes humanitaires de solidarité, de neutralité, d'impartialité et d'indépendance, auxquels je ne suis pas prêt à renoncer ». Ce n'est pas la seule défection qui a touché la fondation créée en février 2025 dans l'État américain du Delaware, dont le siège genevois, qui n'était en fait qu'une façade, a été dissous par les autorités suisses en juin. La société de conseil en gestion Boston Consulting Group a également pris publiquement ses distances avec l'initiative dans un communiqué, affirmant qu'en octobre 2024, certains de ses employés avaient proposé de diriger bénévolement une équipe chargée de créer une organisation humanitaire pour acheminer de l'aide à Gaza « sans toutefois révéler la nature exacte de leur travail, et en accomplissant par la suite des tâches non autorisées ». Ces personnes ont ensuite quitté l'entreprise.

L'arrivée de Moore accentue l'intervention dans la gestion de la GHF des communautés évangéliques américaines proches d'Israël. Président du Congress of Christian Leaders, Moore est membre du conseil d'administration de l'International Fellowship of Christian and Jews (IFCJ), qui se présente comme « la principale organisation à but non lucratif qui construit des ponts entre chrétiens et juifs, bénissant Israël et le peuple juif dans le monde entier par des soins humanitaires et une aide vitale ». Parmi les différentes activités menées, on trouve celles en faveur des soldats israéliens sous forme de « bons pour de la nourriture, des vêtements, des meubles et d'autres biens de première nécessité ; des programmes de soutien pour les anciens soldats, les soldats solitaires (des personnes originaires d'autres pays qui s'engagent dans l'armée israélienne mais n'ont ni amis ni famille en Israël) et les soldats en difficulté ». Mais surtout, l'IFCJ encourage l'immigration juive en Israël comme « accomplissement de la prophétie biblique » (« nous avons contribué à l'accomplissement de la prophétie en aidant plus de 760 000 Juifs à faire leur aliyah, à immigrer en Israël, depuis 1983 », peut-on lire sur le site de l'organisation). Moore est également membre de l'Anti-Defamation League's Task Force for Minorities in the Middle East, une organisation créée en 1913 pour lutter contre l'antisémitisme aux États-Unis.

Se présentant comme le défenseur de la liberté religieuse, Moore, à l'époque de la montée en puissance de l'État islamique (Daech), a tiré la sonnette d'alarme sur la situation des minorités religieuses, chrétiennes et yézidies, victimes des djihadistes. Le chef de la GHF est depuis longtemps très actif au Moyen-Orient, où il a rencontré plusieurs dirigeants politiques et religieux, dont les princes héritiers d'Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, ainsi que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. C'est pourquoi il revendique avoir joué un rôle actif dans la conclusion des « accords d'Abraham », les accords stratégiques entre Israël et certains États arabes de la région, promus sous l'égide de la première administration Trump (2017-2021). Son lien avec l'actuel président américain remonte à la première campagne électorale du magnat en 2016, lorsque Moore était coprésident du comité consultatif évangélique de Donald Trump. L'année suivante, Moore et d'autres évangéliques ont fait pression sur Trump pour qu'il transfère l'ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem. Par la suite, Trump a nommé Moore membre de la Commission américaine pour la liberté religieuse internationale.

La nature parfois opaque de l'origine des fonds de la GHF a suscité des controverses en Israël même. Le chef de l'opposition, Yair Lapid, a qualifié la Fondation de « société écran » financée secrètement par le gouvernement israélien. Lapid a réservé la même définition de « société écran » à une autre organisation américaine qui opère à Gaza aux côtés de la Fondation. Il s'agit de Safe Reach Solutions (SRS) qui, avec UG Solutions (dirigée par un ancien béret vert américain), a été chargée par la GHF d'assurer la protection des sites de distribution de vivres. Il s'agit en fait de contractants armés qui, selon la presse israélienne, opèrent à Gaza depuis janvier 2025, sans la supervision du Shin Bet, le service de sécurité israélien qui opère également dans les territoires palestiniens. À la tête de la SRS se trouve Phil Reilly, un ancien fonctionnaire de la CIA. La société a été constituée dans l'État du Wyoming le 20 novembre 2024 et serait liée à la société américaine de conseil stratégique Orbis Operations, chargée à l'automne 2024 par le gouvernement israélien d'étudier un plan de distribution de l'aide humanitaire sans passer par les agences de l'ONU. Le plan présenté par Orbis Operations prévoyait la création d'un centre de distribution alimentaire par une organisation humanitaire privée, dont la sécurité serait assurée par des entrepreneurs privés, en coordination avec l'armée israélienne. Il s'agit donc du schéma qui a ensuite été adopté avec la fondation GHF et les deux sociétés de sous-traitance, SRS et UG Solutions.
Selon les estimations de l'ONU, depuis le début des opérations de la fondation américaine à Gaza, plus de 580 civils ont été tués et plus de 4 000 blessés dans les centres de distribution de l'aide de la GHF. (LM) (Agence Fides 7/7/2025)


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