Vatican Media
par Gianni Valente
Dans le pèlerinage de l'Église à travers l'histoire, l'anniversaire des dix ans du début d'un Pontificat n'est pas grand-chose. Le Pape François, qui a également lu et consulté abondamment la grande Histoire des papes de Ludwig Von Pastor lorsqu'il était plus jeune, le sait bien.
En ce dixième anniversaire de son élection pontificale, tout le monde parle de lui, on braque les projecteurs et l'attention sur lui, avec un "effet de zoom" qui risque de séparer le Successeur de Pierre du reste du Corps qu'est l'Église.
Lui - et c'est ce qui compte - dans son magistère ordinaire a toujours indiqué autre chose que lui-même. Il s'est référé à des réalités et à des faits plus grands que sa propre personne.
Ces dernières années, dans son magistère ordinaire, le Pape François a attesté que le dynamisme propre à l'événement chrétien a sa seule source dans la grâce du Christ, dans le mystère de son action.
Dans son magistère ordinaire, l'actuel successeur de Pierre a confessé la nature sacramentelle de l'Église, sa dépendance de l'action de l'Esprit Saint. Il a répété que seul le Christ guérit, rachète et sauve.
Au fil des ans, dans son magistère ordinaire, le Pape François a confessé que le Christ se rencontre dans la prière, dans les sacrements et dans ses bien-aimés, qui sont les pauvres. Il a répété des choses qu'il n'avait pas inventées, chaque fois qu'il a insisté sur le fait que la miséricorde, le pardon et la charité sont les traits distinctifs de la nouveauté qui est entrée dans le monde avec Jésus.
Dans son magistère ordinaire, le Pape François a annoncé l'Évangile en tant que tel, et non comme un prétexte pour développer des stratégies ou des projets, non comme une prémisse à partir de laquelle déduire des considérations éthiques ou sociologiques ou politico-culturelles, des théologies et des anthropologies.
Avec son propre style, le Pape François répète la même chose depuis le début de son Pontificat : l'Église ne vit pas de son propre pouvoir, elle ne se place pas dans l'histoire et dans le monde comme une entité autosuffisante et préconstituée. Elle se reconnaît à chaque instant comme ayant besoin du miracle de l'Esprit du Christ. Et ce sont les seules données de la réalité qui peuvent rendre l'Église intéressante pour les hommes et les femmes du temps présent. Le reste n'est que cléricalisme ancien ou nouveau.
Dans son magistère ordinaire, parlant de la mission confiée à l'Église, le Pape François a toujours répété que la foi se communique par "attraction" et non par prosélytisme, tout simplement parce que personne ne va à Jésus s'il n'est pas attiré par lui, si Jésus lui-même ne donne pas le plaisir et la joie d'être attiré par lui. Même dans sa dernière prédication, l'évêque de Rome, en commençant le nouveau cycle de catéchèse sur la "passion d'évangéliser, c'est-à-dire le zèle apostolique", a répété que "nous ne nous annonçons pas nous-mêmes, nous n'annonçons pas un parti politique, une idéologie, non : nous annonçons Jésus. Nous devons mettre Jésus en contact avec les gens, sans les convaincre, mais en laissant le Seigneur convaincre" (voir Fides 11/1/2023).
Dans l'exercice de sa fonction d'évêque de Rome, le Pape François ne s'est pas ménagé, jusqu'à l'autoconsommation physique. Non pas comme le directeur d'une multinationale avec un "mandat d'expiration", mais comme un "pécheur" (sa définition), en suivant le critère déjà exprimé par son maître saint Ignace de Loyola : "Agis comme si tout dépendait de toi, sachant qu'en réalité tout dépend de Dieu".
Au cours de ses dix premières années de pontificat, le pape François a indiqué quelque chose d'autre que lui-même. C'est ce qu'il devait faire. Et il l'a fait.
Au cours de cette dernière décennie, tant d'événements survenus dans l'Église et dans le monde ont rendu encore plus évident le fait que l'Église et le monde ont de plus en plus besoin de guérison. Et la condition de l'Église qui marche dans l'histoire est celle de la mendiante qui ne peut que tendre la main à son Seigneur. L'idée que l'Église se "purifie" et éradique le mal avec des instruments humains et ecclésiastiques, des protocoles et des opérations d'ingénierie institutionnelle, qui ne sont pas des miracles du Christ, peut devenir l'expression d'un orgueil impie, à la longue plus dévastateur que n'importe quelle misère humaine.
Face à la mission vertigineuse qui attend l'Église pour le salut du monde, le dernier problème du Pape François semble être de "finir le travail", de "réaliser le programme" que lui attribuent les élites médiatisées, à l'intérieur et à l'extérieur de la structure ecclésiale.
Dans le temps qui s'est écoulé depuis le 13 mars 2013, même les limites, les incomplétudes et les erreurs très humaines de l'évêque de Rome - souvent reconnues publiquement, et pour lesquelles il s'est lui-même excusé tant de fois - contribuent à attester que l'Église n'est pas sauvée par les hommes. Pas même le pauvre homme appelé à être Pape, le "pauvre Christ" appelé à être "Vicaire du Christ", comme l'a dit le Pape Luciani aux cardinaux qui venaient de l'élire comme successeur de Pierre. C'est pourquoi, dans l'Église, même certaines "incomplétudes" peuvent être bénies, si elles révèlent une fois de plus que l'Église ne brille pas, ne peut pas briller de sa propre lumière et que, dans son pèlerinage terrestre, elle implore toujours la grâce du Christ, qui la purifie et la "réforme".
À l'occasion du dixième anniversaire du Pontificat, les cercles médiatiques spéculent sur les "graines" du Pontificat bergoglien qui n'ont pas encore mûri, ils discutent des "réalisations" manquées et des demi-échecs. Ils coupent les cheveux en quatre et harcèlent le Souverain Pontife lui-même en lui posant des questions sur son éventuelle démission.
Au contraire, il est permis d'imaginer que le Pape François continuera à répéter et à rappeler les choses qu'il a dites jusqu'à présent, toujours les mêmes : Jésus, les pauvres, l'Évangile, l'Église appelée à ne pas se replier sur elle-même et à suivre le Christ ; la proximité qui guérit les blessures et embrasse la réalité humaine telle qu'elle est ; la fraternité comme reconnaissance du destin commun de la famille humaine, et comme seule possibilité de ne pas se laisser submerger par les sirènes de ceux qui veulent "accélérer l'apocalypse" et allumer les feux de la nouvelle guerre mondiale dans le monde entier. Ses préoccupations et ses larmes seront toutes destinées aux abîmes de douleur dans lesquels s'engouffrent les frères et les sœurs de ce temps, et non aux "cibles manquées", réelles ou supposées, du Pontificat. Dans les temps à venir, sa paix spirituelle reposera toujours sur la reconnaissance sereine du fait que c'est le Christ lui-même et son Esprit qui guident l'Église. Et dans le voyage de l'Église à travers l'histoire, le Seigneur sème les graines et les fait fleurir, comme et quand il le veut.
Ainsi, en poursuivant le chemin, le Pape François pourra également embrasser pleinement le Mystère lié à son ministère de Successeur de Pierre, le pêcheur pécheur crucifié à l'envers sur la Colline du Vatican. Sur les traces de Saint Pierre, ses successeurs ont appris à maintes reprises, même à partir de leurs propres intentions mortifiées, à laisser toute l'initiative à l'action du Christ et de son Esprit.
Sur ce chemin, le Successeur de Pierre sera protégé par les prières du peuple de Dieu, qui continue à le bénir, comme il l'a fait à sa demande en cette soirée pluvieuse d'il y a dix ans, lorsque le nouvel évêque de Rome est apparu pour la première fois sur la place Saint-Pierre. Le peuple des pauvres de la terre, qui reconnaît avec son "infaillible" sensus fidei l'odeur de son pasteur, et qui répète pour lui les prières de toujours : "Prions pour notre Pape François Que le Seigneur le préserve, lui donne la vie, le rende heureux sur terre et ne le laisse pas en proie à ses ennemis". (Agence Fides 13/3/2023)
ASIE/INDE - Un symposium 25 ans après « Ecclesia in Asia », pour une Église synodale et missionnaire