Ouagadougou (Agence Fides) – Le Burkina Faso était considéré comme un pays ouvert et tolérant où coexistaient pacifiquement des fois et des ethnies différentes. Aujourd’hui, il est devenu un terrain fertile pour des groupes djihadistes en mesure de perpétrer des actions militaires toujours plus complexes et de gérer des trafics illicites, explique à l’Agence Fides le Père Mathieu Bere SJ, qui a conduit des recherches sur la galaxie du fondamentalisme islamique au Burkina Faso.
Les principaux groupes terroristes qui opèrent au Burkina Faso – explique le Père Bere – sont Islam Ansarul, Jama’at Nusrat al Islam wal-Muslimin et le prétendu « Etat islamique » dans le grand Sahara. Islam Ansarul est principalement actif en province de Soum et dans les provinces limitrophes du nord du pays. Le étendu « Etat islamique » dans le grand Sahara – filiale du prétendu « Etat islamique » dans le Sahara-Sahel – sévit dans les zones frontalières entre le Niger et le Burkina Faso alors que les groupes qui dont désormais partie de la coalition Jama’at Nusrat al Islam wal-Muslimin (Ansar Dine, Macina Liberation Front, Al-Mourabitoun) ont leur siège dans le nord u Mali d’où ils planifient les attaques sur territoire burkinabé.
Certains de ces groupes ont prêté serment de fidélité à Al Qaeda comme, par exemples ceux qui constituent la coalition JNIM sous la conduite d’Iyad Ag Ghaly. Parmi ceux-ci se trouve également Malam Dicko, fondateur d’Ansarul Islam, disciple de Hamadoun Koufa, prédicateur radical et fondateur du Front de libération de la Macina. D’autres comme le prétendu « Etat islamique » dans le grand Sahara ont adhéré au prétendu « Etat islamique ».
« Les rapports entre ces groupes sont complexes et pas toujours stables – indique le jésuite. Cependant, tous ont explicitement revendiqué la responsabilité d’attaques aux Burkina Faso et certaines de ces attaques, dont les auteurs n’ont pas été clairement identifiés, leur ont également été attribuées ».
Par exemple, Ansarul Islam a revendiqué des attaques contre des écoles et des enseignants en province de Soum et les a justifiées en affirmant que dans ces écoles continue à être enseigné le français au lieu du coran et de l’islam. « Derrière cette affirmation – souligne le jésuite – se trouve la conviction que l’éducation moderne occidentale corrompt les jeunes et que si une personne ne connait pas le coran et ne reçoit pas une éducation islamique son âme ne pourra se sauver ». Ansarul Islam – littéralement défense de l’islam – partage donc la même idée de fond que Boko Haram, groupe terroriste sévissant au Nigeria, au Niger, au Tchad et dans le nord du Cameroun et dont le nom en langue hausa signifie le livre (boko) est illicite (haram).
Le Sahel est la région la plus touchée – et en particulier les provinces de Soum et d’Oudalan qui ont subi à elles seules 60% du total des attaques. Ont également été enregistrés des attentats dans la région limitrophe du Niger, dans le nord, le centre-nord et le sud-ouest, proche de la frontière malienne. « Toutefois – remarque le Père Bere – la capitale, Ouagadougou, a, elle aussi, été prise pour cible par des groupes terroristes dans le cadre de complexes attaques coordonnées, par exemple celles ayant frappé le café Cappucino et l’hôtel Splendid en 2016 et les doubles attaques contre le siège central des forces armées et l’Ambassade de France en 2018 ».
Les motifs religieux ne sont cependant pas les seuls à pousser ces groupes à l’action. « Certaine recherche – conclut le religieux – ont démontré que les groupes terroristes de la région du Sahara Sahel sont impliqués dans des activités économiques illicites comme le trafic de drogue, d’armes, les enlèvements en vue d’extorsions et la contrebande de marchandises. S’ils ne gèrent pas directement les trafics, ils les tolèrent notamment parce qu’ils en tirent la majeure partie du financement de leurs activités ». (EC) (Agence Fides 28/06/2019)